Née d’un père turc de tradition musulmane et d’une mère danoise de tradition protestante, Hesna Cailliau est mariée à un français de tradition catholique. Diplômée de science Pô et de sociologie, universitaire, et expert auprès de chefs d’entreprise, elle a pu constater dans sa vie combien les religions aident à comprendre les mentalités. Ses voyages en Asie et en Occident lui font dire : « On ne connaît l’âme d’un peuple qu’à travers ses qualités. »
Son témoignage est important pour nous permettre d'appréhender le monde actuel et futur avec espérance, confiance et optimisme.
Hesna Cailliau, Dame Sagesse vous a invitée à sa table et désirerait mieux vous connaître.
• Comment vous présenteriez-vous ?
Je suis le fruit d’identités multiples, situation difficile à assumer quand on est jeune car on rêve d’être comme tout le monde. De père turc de culture musulmane, de mère danoise de culture protestante, française par mon mariage, et grand-mère atypique de triplés issus de l’union de mon fils et ma belle-fille turco-irakienne !
Il m’a fallu du temps pour me rendre compte de la richesse et de la chance qu’offrait la pluralité des cultures. Je l’ai surtout découvert à travers les qualités développées par mes enfants et leurs conjoints : le courage, la créativité, la curiosité d’esprit...
Mon mari normand m’a transmis des racines terriennes dont j’avais besoin, ma mère danoise, écologiste avant l’heure, m’a communiqué l’amour de la nature comme thérapie de l’âme et m’a montré que le sel de la vie se trouvait dans les petites choses.
Quant à mon père, il m’a donné le goût de l’aventure, de la découverte, car dans la culture musulmane, « être un grand voyageur » est un titre de gloire. J’ai beaucoup voyagé et encore aujourd’hui, grâce à mon métier axé sur l’interculturel. La connaissance naît avant tout des rencontres. Tous ces voyages m’ont fait prendre conscience qu’il existe un lien indissociable entre religion, culture, mentalité et comportement. Croyants ou athées, nous sommes modelés, formatés par nos traditions beaucoup plus que nous ne le croyons. Mais dans les années soixante ou soixante-dix, l’école comme l’université française nous ouvraient peu sur les autres cultures. Convaincus de la supériorité de la culture occidentale, les professeurs étaient persuadés que tout le monde devrait penser ou du moins serait amené, à terme, à penser comme les Occidentaux. La mondialisation a changé la donne, mais laisse les Français désemparés, craignant que l’ouverture vers les autres cultures ne leur fasse perdre leur identité et leurs valeurs.
La France est à l’origine du concept de l’homme universel et de la très belle Charte des Droits de l’homme et du citoyen mais nos philosophes n’ont pas pensé la différence comme inhérente à la nature même du monde. Voilà un chemin oublié de notre pensée. Il est grand temps de réfléchir sur un universel de l’altérité.
• Avez-vous vécu une expérience déterminante qui a modifié, changé votre parcours de vie ? Cette expérience vous a-t-elle amenée à prendre des décisions qui orientent encore votre vie ?
Lors d’un voyage sur le Nil, la rencontre d’une guide copte, Yvette, me parlant des mythes et des symboles de l’ancienne Égypte, m’a fait découvrir le terreau commun aux trois religions monothéistes. Ce fut comme une deuxième naissance à un univers agrandi, une prise de conscience d’une reliance universelle. J’ai eu l’intuition que cette source commune aux trois religions devrait se retrouver dans les religions indienne et chinoise. Car au-delà des différences, c’est le même cœur qui bat dans la poitrine des humains. Confucius disait, voici deux mille cinq cents ans : « Nous sommes différents par la culture, mais semblables par la nature. »
Cette Égyptienne a déterminé ma vocation, celle de montrer les trésors propres à chaque tradition car on ne connaît l’âme d’un peuple que dans ses qualités, non dans ses dérives. Et c’est en mettant l’accent sur le positif que l’on peut créer des ponts entre les peuples, car chaque peuple veut être reconnu à la fois dans sa différence et dans son unité avec les autres.
Souligner l’unité fondamentale des religions n’est pas du syncrétisme. L’unité réside dans la conscience que les religions sont les branches d’un même arbre ou les fleuves d’une même source.
Je pense que toute vocation commence par un éblouissement. Chagall dans ses mémoires raconte le choc qu’il eut, enfant, lorsque son maître d’école épingla sur le mur une reproduction jaunie des Mains de Dürer. Il décida ce jour-là d’être peintre. L’essentiel advient souvent à l’improviste. Tous les êtres humains ont une vocation aussi unique que leurs empreintes digitales, mais peu ont le courage de la réaliser. C’est pourquoi il est dit dans la Bible : « Il y a beaucoup d’appelés mais peu d’élus. » Pour suivre sa vocation, il faut souvent affronter vents et marées, nuits et brouillards.
• Quelle est votre vision du monde actuel ?
Nous vivons « une période axiale » de l’humanité, pour reprendre la formule du philosophe allemand Karl Jasper. Toute période de mutation est passionnante. Nous sortons d’un monde de quatre cents ans de domination occidentale pour entrer dans un monde désormais multipolaire et interdépendant. Cela nous conduit à un changement complet de paradigmes. Toutes les certitudes sur lesquelles reposait notre vision du monde se trouvent ébranlées, à savoir : la toute-puissance de la raison, l’esprit de compétition et son corollaire l’individualisme, le bien-fondé de la force et de la volonté, le mythe d’un progrès sans fin... Il va nous falloir tout réinventer.
La crise actuelle, par son ampleur, ne pourra se résoudre avec les méthodes habituelles. La pensée rationnelle avec ses théories et ses modèles qui, longtemps, ont fait notre force, se révèle impuissante à résoudre les problèmes complexes devant lesquels nous nous trouvons. Le monde lui-même est devenu de plus en plus complexe, incertain et mouvant. La pensée rationnelle qui sépare et oppose est inapte à saisir les interdépendances, les enchaînements et aussi le dynamisme de la vie car les théories et les modèles figent la vie. L’Orient et en particulier l’Inde et la Chine peuvent nous apprendre à penser autrement, car ils ont développé depuis des millénaires une forme de pensée qu’Edgar Morin appelle « la pensée complexe ». Selon son étymologie latine, « complexe » signifie « ce qui est tissé ensemble ». Les cultures orientales constatent que dans la réalité tout est lié, relié comme les trames d’un tapis ; l’important est donc de découvrir non pas les causes à l’origine des phénomènes, mais les interconnexions, c’est-à-dire les liens subtils entre les phénomènes que l’apparence oppose. C’est une autre logique que la nôtre, non plus celle du « ou l’un ou l’autre », mais celle du « et l’un et l’autre ». Elle est fondée sur deux idées essentielles, à savoir que : rien ne s’exclut, rien ne s’annule, tout s’ajoute et s’additionne ; les contraires ne s’opposent pas mais coopèrent, inter et rétroagissent les uns avec les autres dans un rapport de résonance et non plus de cause à effet.
Toute crise est bénéfique. Comme disait le poète allemand Hölderlin : « Les choses qui s’écroulent sont une épreuve, mais aussi une guérison. » En chinois, le mot « crise » signifie « danger » et « opportunité ». Dans notre langue, le mot « catastrophe » évoque la coupure (cata) et le rebond (strophe). Cela me fait penser à la dernière image du film Zorba le Grec, où le héros, apprenant qu’il a tout perdu, se met à danser le sirtaki en murmurant « Bienheureuse catastrophe », conscient qu’une aube nouvelle se lève pour lui.
• Quelles sont les valeurs auxquelles vous êtes attachée ?
Je place en premier les valeurs du cœur qui relèvent du féminin de l’être. En Occident, nous sommes trop dans une culture « yang », masculine : nous valorisons la force, la rationalité, la compétition, la rapidité... Comme immigrée, j’ai essayé d’intégrer cette dimension, sinon je n’aurais pu avoir mes diplômes, ni même un travail avec des responsabilités. Mais aujourd’hui, grâce au bénéfice de l’âge, j’ose être un peu plus moi-même. Ce sont les valeurs féminines qui me font du bien, mais qui permettront aussi de nous sauver. Paraphrasant André Malraux, je dis souvent dans mes conférences que « le troisième millénaire sera féminin ou ne sera pas », car avec les énormes moyens de destruction que l’on possède, c’est toute la planète qui risque d’exploser. Gandhi en était conscient et disait : « Œil pour œil, dent pour dent et le monde entier finira aveugle et édenté. » Au lieu de chercher à libérer la femme orientale, nous devrions plutôt chercher à libérer le féminin en nous, c’est-à-dire les valeurs de douceur, de lenteur, de coopération, d’intuition, d’attention...
La douceur est fondamentale car on ne change pas le monde, ni ses proches par la force. Tout être humain, tout peuple désirent être honorés, reconnus dans leur spécificité. Aussi longtemps que nous voulons forcer le monde, il nous résistera férocement. L’important est de changer notre regard sur le monde. En français, le mot « regard » contient à la fois l’idée d’égard et l’idée de renouveau comme l’évoque le radical de ce mot. Le regard de Jésus transforme les êtres plus sûrement que ses paroles, réveille l’élan enfoui dans leur cœur ! Que d’énergie précieuse dépensons-nous à vouloir à tout prix convaincre l’autre, à le vaincre à coup d’arguments ! Le pire défaut pour la sagesse chinoise est de vouloir avoir raison, car alors on s’enferme dans son raisonnement et on devient sourd et aveugle. « Être sans idée (préconçue) pour s’ouvrir à tous les possibles », disait Confucius. Raisonnons moins pour résonner davantage, débattons moins pour mieux observer. Quand le mental est apaisé, l’intuition peut alors se développer.
Les taoïstes appellent la pensée « la folle du logis » et les bouddhistes, « le singe fou », car toujours agité et jamais satisfait. Elle est source de souffrance car elle nous fait voir la réalité en fonction de nos désirs ou de nos craintes. On comprend mieux alors pourquoi ces cultures accordent une telle importance à la méditation. Celle-ci n’est pas la pensée profonde, au contraire, elle conduit progressivement à l’extinction du cogito, lequel est l’expression de l’ego et de ses désirs insatiables. Sa fonction est triple : voir la réalité telle qu’elle est, retrouver de l’énergie et mieux exploiter son potentiel. Dans la sagesse asiatique, le vide est une notion extrêmement positive, source de possibilités infinies, alors que nous répétons depuis Héraclite que « la nature a horreur du vide ». Pourtant, l’importance du vide se retrouve dans nos propres traditions comme le montre Jean-Yves Leloup : vide le Saint des Saints du Temple de Salomon, vide le tombeau de Jésus. C’est le vide qui permet la résurrection. Nous sommes passés directement du vendredi au dimanche, occultant le samedi ! En s’ouvrant aux autres sagesses du monde, nous retrouvons, on le voit, des sagesses que la poussière du temps a fini par recouvrir.
La lenteur est pour moi une autre valeur fondamentale, elle m’est nécessaire pour me ressourcer. En Occident, nous vivons constamment en flux tendu car notre culture ne cesse de faire l’éloge de la rapidité. L’homme intelligent est celui qui comprend vite, se décide vite et fait vite. Or, à côté du temps chronologique de nos montres qui nous dévore, il y a le temps de la grâce qui nous régénère, celui des poètes, des mystiques et des amoureux. Pour toutes les religions, l’Éternité ne commence pas après la mort, elle est la vie vécue dans la plénitude de l’instant présent. Aussi recommandent-elles de vivre ces deux rythmes en alternance si l’on ne veut pas tomber malade. Aujourd’hui, je n’hésite plus à prendre rendez-vous avec moi-même !
La coopération est une autre valeur que nos sociétés occidentales ont tendance à oublier. Or l’homme est avant tout un être de relation ; chacun peut ressentir au fond de lui que le bonheur est dans le lien plus que dans le bien. Même sur le plan de la créativité, la coopération est à mon sens une valeur ajoutée bien plus grande que la compétition. Si deux atomes d’hydrogène et un atome d’oxygène produisent par fusion ce miracle de vie qu’est l’eau, nous pouvons imaginer ce que peuvent produire ensemble des personnes solidaires et non plus solitaires. Il a été démontré qu’un groupe où règne un bel esprit d’équipe a une intelligence supérieure à celle d’un Einstein.
• Comment les rendez-vous vivantes ?
En apprenant à vivre avec plus de légèreté. Tous ces devoirs que nous nous imposons, toutes ces conditions aussi que nous posons pour atteindre le bonheur, finissent par ôter à la vie toute sa saveur. « Jouir de la vie équivaut à une prière » dit le Coran. Dans « jouissance » on trouve le mot « joie ». Contrairement à notre culture gréco-biblique, les Chinois et les Indiens ne considèrent pas la vie comme un combat ni comme une tragédie. Pour les premiers, c’est un art subtil, pour les seconds, un jeu que les dieux ont organisé pour leur propre divertissement.
Les bouddhistes recommandent le lâcher-prise, c’est-à-dire faire ce qui est à faire avec un esprit détaché, sans attendre les fruits de son action. Il y a plus à défaire qu’à faire. Le poète anglais Chesterton le dit si joliment : « Les anges volent parce qu’ils se prennent à la légère. » L’humilité est une valeur oubliée de nos sociétés modernes, théâtre du paraître. Pour toutes les religions, l’humilité est l’humus de croissance, elle nous rend plus humains et développe l’humour, cette capacité de rire avec tendresse de soi. Humilité, humanité, humour sont des mots de même racine.
• À ce jour, que désireriez-vous transmettre ?
Que la vie est belle et bonne malgré tout... Certes, la souffrance et le mal sévissent dans le monde, mais ils ne doivent pas occulter la beauté et la bonté qui sont tout autant manifestes. Pour capter l’attention, nos médias ne montrent que les arbres qui tombent, et jamais la forêt qui pousse. Ce faisant, le plus beau pays du monde, la France, est devenu le plus pessimiste du monde.
Dans la Bible, Dieu dit à l’homme : « Je mets devant toi, vie ou mort, bénédiction ou malédiction. Choisis la vie, bénis la vie. » Bénir la vie, c’est dire du bien de la vie. Le roi David était l’aimé de Dieu car il faisait de chaque jour de sa vie une fête.
Pour toutes les religions, le bonheur n’est pas un droit, mais un devoir, ne serait-ce que par courtoisie pour ne pas contaminer les autres, un devoir aussi vis-à-vis de soi-même car le pessimisme étouffe nos facultés. L’optimiste n’est pas un utopiste, il sait ce qui ne va pas, mais a décidé de faire vivre ce qui va. L’enthousiasme des parents est la sève de croissance des enfants. Leur donner des racines et des ailes, telle est la fonction première de l’éducation.
L’enthousiasme, en grec, veut dire « rempli d’énergie divine ». A contrario, la plainte est une plaie par laquelle s’échappe cette précieuse énergie. « Celui qui ne possède pas le don d’émerveillement, ses yeux sont à jamais fermés », disait Einstein. Dans « émerveillement », vous retrouvez le mot « éveil ». Le jour où les Français retrouveront la capacité de s’étonner, de s’émerveiller, ils pourront à nouveau faire des miracles. L’étonnement est à mon sens le déclencheur du changement, car il ouvre grandes les portes de l’imaginaire et donc de la créativité. Puissions-nous donc remplacer de temps en temps nos « pourquoi et comment » par le « Ah » d’admiration.
C’est l’expérience vécue par Job ; les commentateurs n’ont retenu que l’affligé, occultant le rescapé. Or, c’est en arrêtant de se plaindre et de se révolter que Job retrouve la vue. Devant lui, il voit soudain les animaux s’ébattre avec insouciance dans la nature. Il comprend alors que Dieu est le Vivant dans la création comme dans la créature. Dieu ne nous épargne pas la souffrance et les épreuves, Il nous permet de rebondir malgré la souffrance, malgré les épreuves.
« Tu es à toi-même ton propre sauveur », tel est le sens du symbole de la Vierge mère qui enfante un Dieu sauveur et que l’on trouve dans presque toutes les religions. Les sages hindous recommandent de « descendre dans la grotte de son cœur pour y découvrir le fond du fond du réel », ce point vierge en chacun de nous, immaculé, libre, non conditionné, impartial, invulnérable. C’est ce qu’avait pressenti le poète Arthur Rimbaud à travers son cri : « Je est un autre. » Ce « je », les Hindous l’appellent le Soi pour le distinguer du moi, de l’ego. Il correspond au « rouâh » de la Torah et au « rûh » du Coran. Les Évangiles l’appellent l’Esprit saint, cette partie saine en nous, parcelle de l’Esprit universel.
En Occident, nous avons confondu l’esprit avec l’âme et oublié que la nature humaine est triple : corps, âme et esprit. Saint Paul dans ses Épîtres distingue le corps somatique, le corps psychique et le corps spirituel. La Résurrection concerne le corps spirituel de l’homme.
L’âme, anima en latin, a donné les mots « animer », « animal ». Tout être vivant est animé de désirs, mais seul l’homme a la capacité d’exalter ses désirs et donc de tomber dans la confusion mentale. L’âme est comme un vitrail qui a besoin de la lumière du ciel pour être éclairée.
L’esprit, spiritus en latin, se manifeste sous forme de lumière mais aussi sous forme de souffle comme l’évoque le mot grec correspondant, pneuma. Il permet de réanimer notre âme quand nous sommes abattus, de rebondir dans les épreuves inhérentes à la vie. Le radical de spiritus se retrouve dans les mots « respiration », « inspiration », « aspiration ». L’esprit est notre bien le plus précieux puisqu’il est notre source d’inspiration et donc de créativité. Il nous rappelle notre aspiration la plus profonde : devenir celui que je suis et ce pourquoi je suis fait. Tel est le sens du Nom divin révélé à Moïse dans le buisson ardent : YHWH « Je serai qui Je serai » (il n’y a pas de verbe au présent en hébreu).
Le refoulement de l’esprit est la cause de toutes les pathologies tant individuelles que collectives. La crise que nous traversons est avant tout une crise spirituelle. Elle est peut-être une chance pour nous de retrouver la verticale de l’existence, et alors rien n’est joué : notre vieille Europe pourra retrouver une jeunesse nouvelle !
• À la lumière de votre expérience, que vous inspire cette déclaration : « Nous sommes tous des compagnons de voyage » ?
Pour Amin Maalouf : « Il n’y a plus d’étrangers, mais que des compagnons de route. » C’est le bon côté de la mondialisation, qui conduit à la circulation des idées, des biens et des personnes. De plus en plus de gens de cultures différentes se rencontrent, travaillent ensemble, se marient aussi. Comme lui, je pense que le salut viendra par la culture et la connaissance, seuls antidotes au racisme, car le mépris et la peur de l’étranger sont toujours liés à l’ignorance. Le choc des civilisations prédit par Samuel Huntington est en fait un choc des ignorances.
J’aime ce beau mot de connaissance que je distingue du savoir. Connaître, c’est naître avec l’autre à une vision nouvelle, une vision élargie. Nous avons chacun à prendre et à apprendre de l’autre. Un proverbe chinois recommande : « Si tu veux être heureux, promène-toi avec deux sacs, l’un pour donner, l’autre pour recevoir. » C’est dans l’échange que l’on change ; encore faut-il être poreux, ressentir un manque, car si je suis plein de moi-même, je n’entends plus rien. Le manque crée un appel d’air.
Dans un monde devenu pluriel, l’heure est venue de proclamer l’égalité en dignité et en valeur de toutes les traditions. Elles sont complémentaires et toutes nécessaires à la croissance de l’humanité. Elles sont toutes imparfaites, étant des œuvres humaines, mais à ce titre utiles les unes aux autres pour en pondérer les excès. Le grand rêve de Léopold Senghor, celui du grand rendez-vous du donner et du recevoir entre nations, est, il me semble, en train de se réaliser. De nombreux signes avant-coureurs vont dans ce sens. Ce qui permet de garder l’espérance et la confiance en notre avenir.
Née d’un père turc de tradition musulmane et d’une mère danoise de tradition protestante, Hesna Cailliau est mariée à un français de tradition catholique. Elle a pu constater dans sa vie combien les religions aident à comprendre les mentalités. Ses voyages en Asie et en Occident lui font dire : « On ne connaît l’âme d’un peuple qu’à travers ses qualités. » Aussi montre-t-elle dans son livre « L’Esprit des religions » (Connaître les religions pour mieux comprendre l'homme.) - (éditions Milan) l’influence positive de la connaissance d’autres cultures.
Son dernier livre : Le paradoxe du poisson rouge. Une voie chinoise pour réussir d'Hesna Cailliau - Édition Saint-Simon - Janvier 2015 ; 144 pages ; 16,50€
Pour l'auteure, Hesna Cailliau, notre monde contemporain ressemble à une mer très agitée. Avec ses courants complexes, ses vents changeants, ses vagues porteuses ou cassantes. Tel un poisson dans l'eau, un pays semble pourtant s'y mouvoir avec agilité et succès : la Chine.
La culture populaire prête à l'animal huit vertus, toutes inspirées de la sagesse chinoise : ne se fixer à aucun port, ne viser aucun but, vivre dans l'instant présent, ignorer la ligne droite, se mouvoir avec aisance dans l'incertitude, vivre en réseau, rester calme et serein, remonter à la source.
Pour mieux connaître Hesna Cailliau : son témoignage au complet dans L'Avenir est en nous - Marie Clainchard ; Edition Dangle - page 55.- 300 pages, 20€
Quarante-trois aventuriers de l'existence et amoureux de la sagesse (Stéphane Hessel, Boris Cyrulnik, Pierre Rabhi, Jean-Marie Pelt, Annick de Souzenelle, Jacqueline Kelen…) ont accepté de s'ouvrir en toute authenticité, simplicité et humanité. Ils évoquent leurs expériences et leurs vécus, leurs découvertes, partagent leurs espérances, transmettent leurs valeurs…